28 Septembre 2008
Déchets nucléaires : fronde à
Gondrecourt-le-Château
Plus de 300 manifestants contre la candidature de la ville pour l'accueil d'un centre de stockage.
BAR-LE-DUC. - « On aura déjà une poubelle nucléaire à Bure ; on n'en veut pas une deuxième », lance Christian Polato dans son porte-voix. Une foule de plus de 300 manifestants lui répond comme un
écho. Le temps d'un après-midi ensoleillé, Gondrecourt-le-Château (Meuse) est devenu le centre de la protestation contre les déchets faiblement radioactifs à longue vie. Les quatre départements
lorrains sont concernés par cette question et des actions étaient organisées à Lunéville, Metz et Neufchâteau.
Plus de 300 manifestants dans les rues de Gondrecourt-le-Château pour demander une nouvelle délibération du conseil municipal.
Photo Nicolas BARREAU
Dans la Meuse, trois cent trente-cinq communes meusiennes ont été consultées par l'ANDRA pour l'accueil d'un centre de stockage. Le 11 septembre dernier, le conseil municipal de
Gondrecourt-le-Château a pris une délibération, avec une majorité de 8 voix, deux votes contre et deux abstentions. Ce qui a suscité l'exaspération d'un groupement d'habitants du canton,
organisateurs de la manifestation. « C'était une décision exceptionnelle, au-delà des compétences des élus », insiste Christian Polato, « il aurait fallu une information et un débat ». Venue avec
son mari et ses quatre enfants, Véronique Pourkat de Delouze, un village des environs. « Nous sommes exactement à cinq kilomètres de Gondrecourt et j'ai peur pour l'avenir
».
Poubelles devant la mairie
Les organisateurs ont lancé une pétition dans la commune qui a réuni 527 signatures. « Sur les 575 habitants de la
commune », précise Christian Polato. Objectif : réclamer un débat public, ainsi qu'une consultation. Et à terme, une nouvelle délibération.
Les organisateurs ont été rejoints par des membres du CEDRA (Collectif contre l'enfouissement des déchets radioactifs) et de la Ligue communiste révolutionnaire.
A l'issue de la manifestation, les participants ont symboliquement aligné des poubelles devant la mairie, avant de faire un siting.
Et de promettre de nouvelles actions.
De son côté, Stéphane Martin, le maire, n'a pas l'intention de revenir sur la délibération. « Nous n'avons pas dit oui à un centre de stockage, mais faisons acte de candidature pour que l'ANDRA
fasse des recherches dans notre sous-sol. Si nous sommes retenus, il y aura un débat et nous pourrons, le cas échéant, revenir sur notre décision ».
Situé à 10 kilomètres de Bure, Gondrecourt-le-Château subit de plein fouet le chômage. « Je ne m'en cache pas : c'est une manne financière et une manière de redynamiser notre territoire,
peut-être en accueillant un centre universitaire spécialisé dans les problématiques de déchets nucléaires ».
Le débat reste ouvert et devrait encore provoquer des remous autour de la commune meusienne.
Jean-Christophe ERBSTEIN
Est-Républicain - 28/09/2008
Neufchâteau : un avertissement contre la tentation du
nucléaire
EPINAL._ Dans les Vosges, trois des 159 communes au sous-sol jugé compatible avec l'enfouissement ont déjà répondu favorablement à l'Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs qui
les avait sollicitées en juin dernier. Or, ces trois villages - Grand, Aouze et Fréville -, sont tous situés dans le secteur de Neufchâteau.
Une centaine de personnes a manifesté, hier après-midi, dans l'Ouest vosgien.
Photo ER
Symboliquement, les opposants au stockage des déchets nucléaires ont donc choisi de manifester dans les rues de la sous-préfecture de l'Ouest vosgien, hier, au milieu des éventaires de la foire
aux pommes. Quelques habitants des villages concernés se sont joints au cortège essentiellement composé de représentants du monde associatif et de militants de partis politiques. Au total, avec
une centaine de manifestants, la mobilisation est restée modeste. Elle sonne toutefois comme un avertissement adressé aux maires vosgiens tentés par les sirènes de l'Andra. Ils ont jusqu'au 31
octobre afin de se prononcer pour ou contre l'accueil d'un site de stockage de déchets radioactifs dits « de faible activité à vie longue ».
B. B. (Baptiste BIZE)
Est-Républicain - 28/09/2008
« La poussière sous le tapis !
»
Une centaine de manifestants a défilé au milieu de la foire aux pommes de Neufchâteau, hier, pour s'opposer à l'éventuel enfouissement de déchets nucléaires dans le secteur.
La petite voix de la marchande de pommes s'efface à mesure que la foule de manifestants investit la rue de France.
Aux « Elles sont bonnes mes pommes » lancés d'un côté semblent répondre les « Ni ici, ni ailleurs » clamés en chœur de l'autre. La guerre des slogans n'aura toutefois pas lieu. Seule contre cent,
la commerçante préfère laisser passer le cortège des opposants à l'enfouissement des déchets nucléaires qui a défilé, hier, au milieu des éventaires de la foire aux pommes de Neufchâteau.
Les manifestants ont dénoncé, hier après-midi, les candidatures des communes de
Grand, Aouze et Fréville.
Photo ER
La sous-préfecture de l'Ouest vosgien se retrouve au cœur de la contestation depuis que trois villages du secteur - Grand, Aouze et Fréville -, se sont déclarés candidats à l'accueil d'un site de
stockage de déchets radioactifs dits de « faible activité à vie longue ». Seuls quelques habitants des communes concernées se sont toutefois glissés dans la foule des représentants des mouvements
associatifs et des militants des partis politiques qui sont de tous les combats écologistes dans les Vosges. Au risque de déplaire à leurs maires respectifs.
Vivre avec le danger
Un couple d'Aouze « venu s'informer pour se faire une opinion » préfère ainsi rester discret. Il faut dire que
Madame n'a pas manifesté depuis Mai-68... Régine Collotte, ancienne conseillère municipale de la commune, ose au contraire dire publiquement tout le mal qu'elle pense d'un éventuel enfouissement
de déchets nucléaires près de chez elle : « Dans le village, beaucoup se disent qu'on a déjà loupé l'aire de l'autoroute A31 qui s'est faite à Sandaucourt et qu'il ne faut pas laisser passer
cette nouvelle opportunité. »
L'argument mille fois entendu fait bondir Dominique, très attaché au Pays de Neufchâteau. « C'est quand même malheureux de se dire qu'il ne reste plus que ça comme espoir de développement
économique ! », lâche-t-il. Dans le mégaphone, un représentant de Vosges Antinucléaire estime qu'enfouir revient à « mettre la poussière sous le tapis pour l'oublier ». Lui veut voir les
encombrants déchets nucléaires sous d'immenses sarcophages : « Pour nous rappeler qu'il faut vivre avec le danger », explique-t-il. « Dans trois ou quatre cents ans, ce seront nos pyramides à
nous. »
Maurice et Marcelle Michel, de Grand, se disent justement animés d'un sentiment de responsabilité envers « les générations futures ». « Un de nos amis aime répéter que les Romains n'ont jamais
pensé à nous ! », racontent-ils. « Nous, on trouve que ceux qui ont produit de l'énergie nucléaire sans prévoir de solution de traitement pour les déchets ont joué avec le feu ; maintenant, le
plus sage est de stocker sur les lieux de production. »
Jusqu'au 31 octobre
S'ils ne pensaient pas à ceux qui peupleraient Grand en 2008, les Gallo-Romains ont malgré tout laissé dans le
village un amphithéâtre de 17.000 places construit au cours du premier siècle de notre ère et une exceptionnelle mosaïque. « Le stockage des déchets nucléaires est tout à fait incompatible avec
la vocation touristique de la commune », ajoute Maurice. « De toute façon, si ça se fait, nous partirons. »
Dans les 156 autres communes vosgiennes sollicitées par l'Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs (Andra), ce premier rassemblement néocastrien, même modeste, nourrira la
réflexion à mener avant le 31 octobre. Le coup de semonce annonciateur d'un grand mouvement de résistance n'a peut-être pas été tiré, mais les opposants sont parvenus à démontrer leur capacité à
mobiliser contre des projets encore hypothétiques.
Baptiste BIZE
Est-Républicain
- 28/09/2008
Avis à la population
Le collectif d'actions contre l'enfouissement des déchets radioactifs était sur le marché de Lunéville, hier, pour interpeller les consommateurs.
Les antinucléaires savent aussi le dire en musique. La preuve, hier matin, à Lunéville.
Du soleil, un peu de vent, et beaucoup de monde dans les allées. De la musique aussi, festive en même temps que contestataire. « Le trou de Bure, on n'en veut pas, arrêtez ça... »
Une grosse banderole pour dire « stop », une tête de mort pour faire peur, et, sur les épaules des manifestants, les calicots des différents mouvements politiques, ou non, rassemblés au sein du
collectif meurthe-et-mosellan d'action contre l'enfouissement des déchets radioactifs, le Cacendr 54.
L'image était insolite hier sur le marché de Lunéville, où les antinucléaires de la région s'étaient donné rendez-vous dans le cadre de la journée nationale d'opposition au projet Fa-VL pour «
déchets radioactifs à faible activité et à vie longue ».
Lunéville n'avait pas été choisie au hasard. « Jacques Lamblin est le seul maire à n'avoir pas fermé la porte à l'ANDRA », explique Christiane Jadelot, l'un des deux porte-parole du collectif,
avec Philippe Leclerc.
Beaucoup de noir
Explications : 315 communes de Meurthe-et-Moselle ont reçu, courant juin, un appel d'offre de l'ANDRA, l'Agence
nationale pour la gestion des déchets radioactifs, leur proposant de mettre leur sous-sol à sa disposition pour l'enfouissement des déchets radioactifs à faible activité et à vie longue (ndlr :
la France en possède 200.000 m3).
Réponse attendue pour le 31 octobre. Pas besoin d'inscrire cette question à l'ordre du jour des conseils municipaux, même si beaucoup l'ont fait. Le maire peut seul accepter ou pas de porter sa
commune candidate au projet de l'ANDRA. « Lunéville n'a pas encore dit franchement non », regrette Philippe Leclerc, tandis que les manifestants s'égrènent dans les allées du marché, tracts en
main. Un « avis à la population » illustré d'une carte de France, où ont été noircies les régions susceptibles d'intéresser l'ANDRA. Et il y a beaucoup de noir sur la Lorraine.
Ce que ne manque pas de regretter la verte député européenne Marie-Anne Isler-Beguin. « C'est à se demander, si l'argent de l'ANDRA ne devra pas compenser les 12.000 emplois militaire perdus »,
s'interroge-t-elle.
Expliquer
Contestée également l'approche territoriale du dossier. « Il n'est pas normal de demander à des communes de se
positionner. Le Conseil général et le Conseil régional devraient être les interlocuteurs de l'ANDRA », estime Marie-Hélène, une manifestante.
« En fait, les gens sont totalement ignorants de ce qui risque de se passer chez eux », observe Philippe Leclerc. « Ils ne se sentent pas concernés, sans doute parce qu'ils ne mesurent pas le
danger d'un tel projet ». Pas tous pourtant. Pour preuve la pétition, qui aligne les signatures, tandis que des petits groupes de discussion se forment ici et là.
Le collectif ne demande pas mieux que d'expliquer. Aux consommateurs du marché de Lunéville, mais aussi aux élus, auxquels il propose d'organiser des réunions d'information « contradictoires
».
« Car l'appellation de déchets à faible radioactivité est trompeuse au regard de la longévité de leur dangerosité, » avertit le Cacendr54, qui évoque une période de nocivité de l'ordre de
milliers d'années.
« L'ANDRA fait miroiter des sous aux communes et on entend dire par certaines personnes que ça créera de l'emploi. Mais c'est oublier les incidents à répétition, comme récemment au Tricastin, et
la dangerosité que représente la radioactivité pour l'homme, sa santé et son environnement », conclut le porte-parole du collectif meurthe-et-mosellan.
Catherine AMBROSI
Est-Républicain - 28/09/2008
Ville-en-Woëvre : le maire persiste
Malgré les protestations du préfet, Jean-Marie Cousin maintient son référendum
aujourd'hui.
Déterminé et agacé. Jean-Marie Cousin, maire de Ville-en-Woëvre et conseiller général Modem du canton de Fresnes, n'a pas l'intention de reculer. Il ouvrira ce matin les bureaux de votes de sa
mairie pour permettre à ses administrés de donner leur avis sur un éventuel enfouissement de déchets nucléaires de faible activité et vie longue dans leur sous-sol.
Consultatif
Et tant pis si Évence Richard, le préfet de la Meuse, et François Proisy, le sous-préfet de Verdun, considèrent sa
démarche nulle et non avenue.
« Je vais faire ce référendum, cette consultation locale. Qu'est ce qui m'interdit dans la loi de consulter l'opinion de la population. Il faudra me passer sur le corps pour m'empêcher », tonne
Jean-Marie Cousin qui n'aura certainement pas besoin d'arriver à un tel extrême.
Il devrait pouvoir ce matin ouvrir son bureau de vote à 8 h et le fermer en fin de journée vers 18 h avant de réunir son conseil municipal après le dépouillement pour voter une délibération
conforme à la volonté exprimée par son peuple.
Détermination
« C'est comme s'ils venaient de découvrir l'existence de cette consultation 48 heures avant alors qu'il y avait une personne des renseignements généraux en juillet dans la salle où j'ai organisé
un débat public sur le sujet. J'ai l'impression que l'on dérange mais cela ne change rien à notre détermination », assure Jean-Marie Cousin qui rappelle le caractère « consultatif ».
Bien conscient du risque de voir sa démarche retoquée, il se justifie : « Ce n'est pas un référendum local car la procédure pour le mettre en place est très compliquée. En effet, une délibération
du conseil ne suffit pas, il faut que cela soit validé par le préfet... » Même si ce n'est pas du goût des représentants de l'Etat dans le département, Jean-Marie Cousin a voulu faire au plus
simple.
Sébastien GEORGES
Est-Républicain - 28/09/2008