ACCID est une association loi 1901 qui a pour but de s'opposer à l'implantation d'un Centre de Stockage de Déchets Ultimes ou à tout autre type de décharge ou de stockages contrôlés
27 Novembre 2008
La détermination des opposants grandit dans cette commune de l'Ouest vosgien candidate à l'accueil d'un centre de stockage de déchets nucléaires. Premier débat.
L'homme qui a réuni une cinquantaine de personnes à la salle municipale d'Aouze pour parler de la gestion des déchets nucléaires, à l'heure où la première chaîne diffuse un épisode inédit des Experts à Miami, arbore un badge explicite sur la poitrine : « Nucléaire ? Non merci ! »
Il y a deux mois, ce même Monsieur Tout-le-Monde s'était glissé dans la foule des antinucléaires lors de la manifestation qui avait rassemblé une centaine de personnes à Neufchâteau. Soucieux de rester discret, Daniel Lardin expliquait alors de manière anonyme être « venu s'informer pour se faire une opinion ». Il avait même quitté le cortège en voyant fleurir les drapeaux de la Ligue communiste révolutionnaire.
De toute évidence, cet homme-là n'était pas un de ces militants prêts à battre le pavé au moindre appel de mégaphone ! Mais sa commune venait de se porter candidate à l'accueil d'un centre de stockage de déchets nucléaires de faible activité à vie longue et il se retrouvait soudain directement concerné par un problème national.
A son initiative, une partie de la population d'Aouze s'est donc rassemblée mardi soir pour assister à la projection d'un diaporama mis au point par le réseau Sortir du nucléaire. Le porte-parole du collectif Vosges Antinucléaire est là, qui explique la manière dont les radiations désintègrent les êtres humains et affectent leur génome, parle de la catastrophe de Tchernobyl, évoque la contamination des nappes phréatiques et assure qu'une étude allemande a démontré que les taux de leucémie étaient cinq fois plus élevés que la moyenne autour des centrales nucléaires. A chaque argument avancé, un frisson parcourt l'assistance. Stéphane Maimbourg - c'est le nom dudit porte-parole -, en profite pour rappeler que seules cinq des cent cinquante-neuf communes vosgiennes sollicitées par l'Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs (Andra) ont fait acte de candidature pour accueillir la nouvelle poubelle nucléaire de la France. Or, Rouvres-en-Xaintois et Fréville s'étant désistés, seuls les villages de Soulosse-sous-Saint-Elophe, Grand et Aouze sont encore en lice.
« Le pactole »
Naturellement, les regards obliques se tournent très vite vers le maire et ses adjoints, présents au fond de la
salle. Ce sont eux qui ont pris une délibération en ce sens, fin août. « C'est vous le maire », lance un voisin meusien au fond de la salle. « Eh bien je ne vous félicite pas ! » L'intéressé,
Gilles Chognot, élu en mars dernier, assure ne rien regretter : « S'il fallait le refaire, je le referais ! » Plusieurs habitants expriment leur colère. Lui reprochent de ne pas avoir été
consultés. Le maire répond qu'il est « là pour écouter ». « Peut-être, mais vous n'écoutez pas ce qu'on vous dit », rétorque une dame dans la salle.
Après une heure et demie de présentation, le ton monte forcément. Gilles Chognot assure ne pas comprendre pourquoi les habitants ne veulent pas de sa décharge nucléaire malgré le « pactole »
promis par l'Andra. On lui demande s'il a des enfants, des petits-enfants, s'il ne se soucie pas de leur avenir. Il botte en touche. Son premier adjoint avoue ne pas croire que les économies
d'énergie et les sources d'énergie renouvelables régleront la question. « Vous êtes élus pour six ans et vous engagez des centaines de générations dans ce projet », reproche Stéphane
Maimbourg.
Vers un référendum ?
Les noms d'oiseaux fusent. Le maire réclame un débat « courtois ». Un chasseur excité est persuadé que le
Président de la République est derrière tout cela : « Sarkozy veut foutre la m... dans notre beau petit village bien tranquille où il y a deux cents pauvres pélicans ! Nos libertés sont bafouées
! » La plupart des habitants, plutôt séduits par les promesses de l'Andra, estiment avant tout que si Aouze dit non, d'autres communes de la région diront oui. « Elles auront les sous et s'il y a
un problème, on sera quand même contaminés », résume un ancien en rappelant que le village voisin de Bure devrait hériter des déchets dits de haute activité à vie longe. « Sauf si tout le monde
dit non partout », insiste une militante antinucléaire. « Mais si personne n'en veut, qu'est-ce qu'on fait des déchets ? », interroge un autre habitant. Réponse : « On les laisse dans les
centrales où ils sont, et on construit des sarcophages autour. Il ne faut pas enterrer le problème ! »
Plus remonté que jamais, Daniel Lardin promet aux élus municipaux un bras de fer en bonne et due forme : « On va créer une association, on va lancer une pétition, on fera un référendum d'initiative populaire. Croyez-nous, on ne va pas laisser faire ! » Message reçu, a fait savoir le maire, tout aussi déterminé.
Baptiste BIZE –Est-Républicain - 27/11/2008