Un acte de foi (Est-Républicain)

Conclusion de Daniel Gremillet à l'issue d'un discours sur les difficultés des agriculteurs : « Le monde est perturbé, c'est intéressant à vivre ! »

Il aime assez les contre-pieds, Daniel Gremillet. A la fois coureur à pied et pilote de rallye, le voici qui exhorte à la confiance alors que le monde perd la boule. Le libéralisme aveugle progresse, la spéculation ruine la planète, la mondialisation triomphe ? Raison de plus de serrer les rangs entre agriculteurs, de poser les enjeux et de revendiquer des solutions équitables. C'est ce qui ressort d'une session atypique, marquée par le double départ du préfet Albert Dupuy, très apprécié de la profession, et de Brice Pourchet, directeur efficace et humaniste convaincu. « C'est la première fois que je reçois une médaille (de la Chambre d'agriculture) dont le coffret est en bois », a relevé le représentant de l'Etat. Suscitant une observation de Daniel Gremillet : « Tout a été fait dans les Vosges, réalisé par l'Imagerie d'Épinal », a-t-il ajouté devant Michel Heinrich.


Le préfet Dupuy à Daniel Gremillet : « C'est la première fois que l'on me remet une médaille dans un coffret en bois ! »

Les agriculteurs n'ont plus le choix. Il leur faut entrer dans un monde de concurrence effrénée. Le marché est de moins en moins organisé. Un exemple : « Il y a un an, il fallait produire davantage pour répondre à la crise alimentaire, nourrir toute la population. Les cours des céréales et du lactosérum s'envolaient. Celui de la viande montait. »

Concurrences

Un an après, le retournement est spectaculaire. Le prix du baril de pétrole s'est effondré, mais ceux des aliments pour le bétail et de l'engrais sont restés élevés. Classique effet de ciseaux. Les producteurs de lait des régions au climat plus favorisé, comme la Bretagne et la Normandie, ont augmenté leur production de 20%, et des volumes bien plus importants pèsent sur le marché. Du coup, le prix du lait baisse. La Lorraine est pénalisée par le rétrécissement du marché allemand, grignoté par les fermes d'ex-Allemagne de l'Est, et par des frais de transport plus lourds. Elle s'en sort en fabriquant des fromages, produits à plus grande valeur ajoutée que le beurre, la poudre ou l'emmental : AOC de Brie, Comté, Langres et Munster. La concurrence touche les régions françaises, mais aussi européennes : en témoigne l'Italie qui a obtenu un relèvement immédiat de 5 % de ses quotas laitiers, contre 1 % pour les autres pays européens.


Les agriculteurs ont notamment voté une motion contre les dégâts des sangliers.

Pour restaurer une règle du jeu équitable, Daniel Gremillet demande un assouplissement des réglementations drastiques du « Grenelle de l'environnement » : elles entraînent l'abandon de pratiques culturales qui permettent de nourrir le plus grand nombre. Il réclame la réorientation des aides en faveur de l'herbe, produit idéal pour l'environnement. Et observe que l'excès de réglementation a privé les agriculteurs des aides promises pour la mise aux normes des bâtiments.


Brice Pourchet : sa dernière assemblée générale.

Les dégâts du gibier et la fièvre catarrhale ont achevé d'unir les paysans dans une même protestation.

J-P.VANNSON - Est-Républicain - 13/12/2008