ACCID est une association loi 1901 qui a pour but de s'opposer à l'implantation d'un Centre de Stockage de Déchets Ultimes ou à tout autre type de décharge ou de stockages contrôlés
18 Février 2009
Comme d’autres pays européens, la France a recours
notamment à l’incinération pour traiter ses ordures ménagères ; l’incinération représentait le 2ième mode de traitement avec 27 % des déchets incinérés en 2006 [ITOM 2008]. Les usines
d’incinération d’ordures ménagères (UIOM) sont des centres d’incinération spécifiques aux déchets ménagers et assimilés (déchets non dangereux des ménages ou provenant des entreprises
industrielles, des artisans, commerçants, écoles, services publics, hôpitaux, services tertiaires et collectés dans les mêmes conditions). Elles constituent une alternative au stockage, au
recyclage ou à la valorisation organique, pour le traitement de déchets. L’incinération est pratiquée actuellement dans environ 130 usines contre environ 300 en 1998 pour des quantités incinérées globalement identiques (www.sinoe.org ; dossier
thématique InVS, http//www.invs.sante.fr/surveillance/incinerateurs/default.htm).
Cette réduction du nombre d’usines s’est accompagnée de la mise en conformité d’installations existantes, de la fermeture d’un grand nombre d’installations anciennes et de la construction
d’installations neuves aux normes en vigueur. Les émissions de dioxines en France provenant de l’incinération de déchets ont baissé de 94 % entre 1995 et 2006 (www.ecologie.gouv.fr). Toutefois, les populations riveraines de ces installations se sont interrogées sur leur impact sur la santé et sur la
contamination par les dioxines dont elles pourraient être responsables. Ces interrogations sont liées d’une part, à la présence ponctuellement constatée de dioxines à des teneurs élevées dans des
aliments tels que le lait de vache produit à proximité de certains incinérateurs et, d’autre part, à la persistance de certains composés chimiques émis dans l’environnement, dont les dioxines et
certains métaux. Des études réalisées à l’étranger ont estimé, à l’aide d’indicateurs biologiques, l’imprégnation par les dioxines de ces riverains, imprégnation qui traduit l’exposition au
niveau de l’organisme. Les résultats ont conclu que résider autour d’UIOM avait peu d’influence sur les concentrations sériques1 de dioxines des riverains [Evans 2000, Schumacher 1999, Deml 1996,
Gonzalez 1998].
Néanmoins, ces travaux ne prenaient en compte ni la zone de retombée du panache de l’incinérateur, ni la voie principale d’exposition connue pour les dioxines, à savoir la consommation
alimentaire. Deux études ont pris en compte la consommation alimentaire locale de riverains d’UIOM ayant de fortes émissions de dioxines : une étude taïwanaise [Chen 2006] qui a montré une
imprégnation - de dioxines un peu supérieure chez les riverains d’incinérateurs consommant des produits locaux et une imprégnation moindre chez les végétariens ; une étude belge [Fierens 2003]
qui a montré que la consommation - de graisses animales provenant de produits d’origine
locale (viande, oeufs ou produits laitiers obtenus sous les retombées du panache de l’incinérateur), était associée à une augmentation des concentrations sériques en dioxines des
riverains.
En 2002, à la demande de la Direction générale de la santé (DGS), l’InVS a engagé une démarche nationale pour apporter dans un
cadre cohérent et adapté des réponses aux attentes des décideurs et de la population. Trois groupes de travail ont été mis en place par l’Institut de veille sanitaire dont l’un en 2003, en
collaboration avec l’Agence française de sécurité sanitaire des aliments (Afssa) pour étudier la pertinence et la faisabilité d’une étude d’imprégnation par les dioxines des populations résidant
à proximité des UIOM. Ce groupe a fait un état des connaissances et a proposé la mise en place d’une étude multicentrique. Ceci a fait l’objet d’un rapport (InVS-Afssa, 2003) disponible sur le
site de l’InVS : www.invs.sante.fr/publications/2003/incinerateurs_3/index.html
Les conclusions de ce rapport étaient que l’étude devait porter sur plusieurs sites d’incinérateurs à identifier
ultérieurement, et devait comporter : un volet "d’imprégnation" visant à refléter l’exposition des
- populations concernées au travers du dosage des dioxines dans les liquides biologiques ; et un volet de "consommation alimentaire" permettant d’estimer - la part de la consommation de produits locaux, nécessaire à l’interprétation des résultats épidémiologiques. En 2004, l’InVS a lancé en collaboration avec l’Afssa une étude nationale, financée dans le cadre du Plan cancer pour étudier si les populations vivant autour des usines d’incinération d’ordures ménagères étaient plus imprégnées par les dioxines que celles qui en étaient éloignées et pour identifier les facteurs contribuant à cette éventuelle surimprégnation. Ce rapport présente les résultats de cette étude qui a été mise en oeuvre durant le premier semestre 2005.
L’étude imprégnation par les dioxines et les métaux lourds (plomb, cadmium) a été réalisée auprès de plus de 1 000 personnes
résidant à proximité de huit UIOM et pour lesquelles des prélèvements biologiques à des fins de dosages et des questionnaires ont été recueillis. Elle avait pour but de comparer l’imprégnation
des personnes résidant à proximité d’une UIOM à celle de personnes témoins et de déterminer les déterminants de cette imprégnation. Dans cette étude, l’imprégnation reflète une exposition
relativement récente (années 90-2000) comparée à une autre étude de l’InVS sur les cancers et les UIOM. Ses résultats les plus marquants sont les suivants.
Dioxines et PCB-DL 5.1
L’imprégnation aux dioxines et PCB dioxin-like dans la population de l’étude (exposés et témoins) est dans la moyenne européenne. Les facteurs personnels (âge, corpulence, sexe, variations de
poids, tabagisme...) et la consommation alimentaire habituelle sont les déterminants essentiels de l’imprégnation. Il n’y a pas d’éléments en faveur du rôle de l’exposition par inhalation
(question fortement soulevée initialement). Cette étude souligne le rôle déterminant des produits de la pêche sur l’imprégnation par les dioxines et PCB.
Il n’y a pas de différence statistiquement significative entre l’imprégnation des personnes exposées et non-exposées au panache d’un incinérateur, sauf pour une population particulière :
celle des autoconsommateurs de produits animaux élevés sous le panache (notamment les produits laitiers et les oeufs), en particulier les agriculteurs. Cette
relation n’est pas retrouvée pour la consommation de produits végétaux. Elle est observée principalement dans le cas des incinérateurs anciens et hors normes. Concernant les risques sanitaires,
il faut souligner que malgré l’augmentation de la charge corporelle en dioxines observée chez les riverains d’UIOM, les concentrations de dioxines atteintes restent dans l’ensemble dans des
valeurs observées actuellement en Europe pour des populations d’âge comparable et non-exposées à un incinérateur ou à une installation industrielle pouvant
émettre des dioxines. Elles restent inférieures à celles des forts consommateurs de poissons. Ces valeurs sont aussi très largement en dessous (10 à 100 fois) de celles qui ont été observées lors
d’expositions accidentelles ou industrielles.
Les riverains des incinérateurs étudiés ne
montrent pas de surexposition statistiquement significative aux métaux lourds (plomb, cadmium), bien qu’on observe une légère tendance non significative à l’augmentation de la charge corporelle
en cadmium.
La plombémie reste dans des valeurs habituelles pour la population générale. Les facteurs de variation et de
confusion ont un poids beaucoup plus importants sur la plombémie que les facteurs liés à l’incinérateur. Il n’y a pas d’éléments en faveur du rôle de l’exposition par inhalation. Même si la
consommation de certains aliments locaux (viandes, produits laitiers, oeufs) influence la plombémie, cette influence reste modérée.
Pas d’imprégnation par le cadmium statistiquement supérieure chez les riverains des incinérateurs. La cadmiurie
reste dans des valeurs habituelles pour la population générale, considérées comme normales pour une population non-exposée professionnellement. Cette cadmiurie n’a pu être reliée à la
consommation de produits locaux, contrairement aux
dioxines.
Sur le site de l'InVS, le rapport complet et ses annexes
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