Par un arrêt du 3 septembre 2009, le Conseil d'Etat a
précisé les critères d'appréciation de la protection spéciale prévue par l'article L. 146-6 du Code de l'urbanisme. Cet article prévoit que les zones constituant des "espaces remarquables"
doivent être protégées des opérations d'urbanisme.
Le maire d'une commune avait délivré par arrêté un permis de construire un bâtiment à usage
commercial. Une association écologiste avait demandé l'annulation de ce permis au tribunal administratif au motif que le bâtiment était inclus dans le périmètre de la zone naturelle d'intérêt
écologique, faunistique et floristique (Znieff) de l'étang de Canet-Saint-Nazaire ainsi que dans la Znieff de la zone humide d'Al Cagarell, étant précisé que ces deux zones ont fait l'objet d'une
inscription aux sites Natura 2000.
Si le tribunal administratif a rejeté la demande d'annulation, la Cour administrative d'appel (CAA) de Marseille y a fait droit. La commune et le titulaire du permis ont intenté un pourvoi à
l'encontre de l'arrêt de la CAA.
L'"intérêt écologique particulier"
Le Conseil d'Etat rejette le pourvoi, la CAA ayant relevé que le terrain d'assiette du permis de construire délivré par le maire était inclus dans le périmètre de la Znieff de l'étang de
Canet-Saint-Nazaire ainsi que dans la Znieff de la zone humide d'Al Cagarell. Or, ces deux zones présentent "un intérêt écologique particulier du fait de la richesse du faciès de végétation et de
l'avifaune qui comprend vingt et une espèces nicheuses".
Les juges relèvent en outre que le terrain litigieux n'est entouré d'aucune construction. Ils précisent que si ce terrain est situé à proximité d'un secteur urbanisé, il en est séparé par une
avenue.
L'annulation du permis de construire dans le périmètre de l'espace remarquable
Le Conseil d'Etat conclut que la CAA, en prenant en compte l'intégration du terrain dans les deux zones naturelles d'intérêt écologique, faunistique et floristique
et son inscription aux sites Natura 2000, a fondé son appréciation sur l'intérêt écologique de la zone et ses caractéristiques propres au regard des critères définissant les espaces remarquables.
Le terrain étant inclus dans des zones constituant des espaces remarquables, il devait bénéficier de la protection prévue par l'article L. 146-6 du Code de l'urbanisme, ce qui justifiait
l'annulation de l'arrêté délivrant le permis de construire.
Pour rappel, l'article L. 146-6 dispose que "les documents et décisions relatifs à la vocation des zones ou à l'occupation et à l'utilisation des sols préservent les espaces terrestres et marins,
sites et paysages remarquables ou caractéristiques du patrimoine naturel et culturel du littoral, et les milieux nécessaires au maintien des équilibres écologiques".
Source : Conseil d'État, 3 septembre 2009, N° 306298
"Considérant qu'aux termes de l'article L. 146-6 du code de l'urbanisme : Les documents et décisions relatifs à la vocation des zones ou à l'occupation et à l'utilisation des sols préservent les
espaces terrestres et marins, sites et paysages remarquables ou caractéristiques du patrimoine naturel et culturel du littoral, et les milieux nécessaires au maintien des équilibres écologiques.
Un décret fixe la liste des espaces et milieux à préserver (...) ; qu'aux termes de l'article R. 146-1 du même code, dans sa rédaction applicable à l'espèce : En application du premier alinéa de
l'article L. 146-6, sont préservés, dès lors qu'ils constituent un site ou un paysage remarquable ou caractéristique du patrimoine naturel et culturel du littoral, sont nécessaires au maintien
des équilibres biologiques ou présentent un intérêt écologique : (...) e) Les marais, les vasières, les tourbières, les plans d'eau, les zones humides et milieux temporairement immergés ; f) Les
milieux abritant des concentrations naturelles d'espèces animales ou végétales telles que les herbiers, les frayères, les nourriceries et les gisements naturels de coquillages vivants ; les
espaces délimités pour conserver les espèces en application de l'article 4 de la loi n° 76-629 du 10 juillet 1976 et les zones de repos, de nidification et de gagnage de l'avifaune désignée par
la directive européenne n° 79-409 du 2 avril 1979 concernant la conservation des oiseaux sauvages (...) ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que c'est sans commettre ni erreur matérielle ni dénaturation des faits que la cour administrative d'appel de Marseille a
relevé que le terrain d'assiette du permis de construire délivré le 28 janvier 2000 à M. par le maire de Canet-en-Roussillon, était inclus dans le périmètre de la zone naturelle d'intérêt
écologique, faunistique et floristique (ZNIEFF) de l'étang de Canet-Saint-Nazaire ainsi que dans la ZNIEFF de la zone humide d'Al Cagarell, que ces deux
zones ont par la suite fait l'objet d'une inscription aux sites Natura 2000, que ces zones présentent un intérêt écologique particulier du fait de la richesse du faciès de végétation et de
l'avifaune qui comprend vingt et une espèces nicheuses, que le terrain litigieux n'est entouré d'aucune construction et que, s'il est situé à proximité d'un secteur urbanisé, il
en est séparé par une avenue ; que, si la cour a pris en compte l'intégration du terrain dans les deux zones naturelles d'intérêt écologique, faunistique et floristique et son inscription aux
sites Natura 2000, elle a fondé son appréciation, ainsi qu'il ressort de la motivation de l'arrêt, sur l'intérêt écologique de la zone et ses caractéristiques propres au regard des critères
définissant les espaces remarquables, pour en déduire que le terrain litigieux était inclus dans des zones qui constituent des espaces remarquables devant bénéficier de la protection prévue par
les dispositions précitées de l'article L. 146-6 ; qu'il s'ensuit que la COMMUNE DE CANET-EN-ROUSSILLON et M. ne sont fondés à soutenir, ni que la cour aurait commis une erreur de droit en
déduisant, sans prendre en considération les caractéristiques propres du terrain, la qualification d'espace remarquable au sens de l'article L. 146-6 du code
de l'urbanisme, de la seule inclusion du terrain d'assiette dans des ZNIEFF ou de son inscription aux sites Natura 2000, ni qu'elle aurait inexactement qualifié les faits en
jugeant que le terrain d'assiette du projet devait être regardé comme un espace remarquable au sens de ce même article ;"
Conseil d'Etat
Sous-sections 4 et 5 réunies
Appel
3 Septembre 2009
N° 306298
Publié aux tables du Recueil Lebon
COMMUNE DE CANET-EN-ROUSSILLON ; SERAN
MINISTERE DE L'ECOLOGIE, ENERGIE, DEVELOPPEMENT DURABLE ET MER
Code de l'urbanisme
Article L146-6
Modifié par Ordonnance n°2004-637 du 1 juillet 2004 - art. 28 JORF 2 juillet 2004 en vigueur le 1er juillet 2006
Les documents et décisions relatifs à la vocation des zones ou à l'occupation et à l'utilisation des sols préservent les espaces terrestres et marins, sites et paysages remarquables ou
caractéristiques du patrimoine naturel et culturel du littoral, et les milieux nécessaires au maintien des équilibres biologiques. Un décret fixe la liste des espaces et milieux à préserver,
comportant notamment, en fonction de l'intérêt écologique qu'ils présentent, les dunes et les landes côtières, les plages et lidos, les forêts et zones boisées côtières, les îlots inhabités, les
parties naturelles des estuaires, des rias ou abers et des caps, les marais, les vasières, les zones humides et milieux temporairement immergés ainsi que les zones de repos, de nidification et de
gagnage de l'avifaune désignée par la directive européenne n° 79-409 du 2 avril 1979 concernant la conservation des oiseaux sauvages et, dans les départements d'outre-mer, les récifs coralliens,
les lagons et les mangroves.
Toutefois, des aménagements légers peuvent y être implantés lorsqu'ils sont nécessaires à leur gestion, à leur mise en valeur notamment économique ou, le cas échéant, à leur ouverture au public.
Un décret définit la nature et les modalités de réalisation de ces aménagements.
En outre, la réalisation de travaux ayant pour objet la conservation ou la protection de ces espaces et milieux peut être admise, après enquête publique suivant les modalités de la loi n° 83-630
du 12 juillet 1983 précitée.
Le plan local d'urbanisme doit classer en espaces boisés, au titre de l'article L. 130-1 du présent code, les parcs et ensembles boisés existants les plus significatifs de la commune ou du
groupement de communes, après consultation de la commission départementale compétente en matière de nature, de paysages et de sites.